Man picking coffee cherries from tree
A cup of coffee
Entretiens

Robusta fin : La nouvelle perle du café africain en plein essor

8 avril 2025
Sarah Charles s'est entretenue avec Ismaël Ndjewe Ndomba, Secrétaire exécutif de l'Agence des cafés Robusta d'Afrique et de Madagascar

Avec la flambée des prix de l'Arabica, la diversification dans le Robusta fin constitue pour les producteurs africains l'opportunité de sécuriser l'accès au marché et d'augmenter les revenus des agriculteurs.

 

L'Agence des cafés Robusta d'Afrique et de Madagascar (ACRAM) mène la charge pour positionner le Robusta africain comme un café de qualité supérieure sur la scène mondiale. En collaboration avec le Centre du commerce international (ITC) et les partenaires régionaux, l'ACRAM mène des initiatives pour améliorer la qualité du café, créer de la valeur grâce à la torréfaction et aux marques locales, et stimuler la consommation nationale de café.

 

Ismaël Ndjewe Ndomba, Secrétaire exécutif de l'ACRAM, partage ses idées sur la vision de l'agence sur le Robusta africain, son rôle dans le mouvement Fine Robusta et les exportations, et la manière dont le café peut stimuler la transformation économique à travers le continent.

 

L'entretien a été édité et condensé pour gagner en clarté.

Pourquoi est-ce le moment idéal pour l'Afrique de se concentrer sur le Robusta fin ?

Les marchés mondiaux du café sont en pleine mutation. Face aux niveaux records des prix de l'Arabica, les acheteurs sont à la recherche d'alternatives capables d'offrir une qualité comparable tout en garantissant des prix stables.

C'est là que le Robusta fin entre en jeu. Les pays africains producteurs de Robusta ont la possibilité de différencier leur café, d'améliorer les techniques de traitement et d'accéder à de nouveaux marchés au-delà de la vente de produits de base en vrac.

En collaboration avec le Centre du commerce international (ITC)*, nous nous efforçons d'améliorer la qualité du Robusta et de créer des liens commerciaux directs pour les producteurs africains. Cela se traduit par de meilleurs revenus pour les agriculteurs, des investissements dans la valeur ajoutée locale et une reconnaissance accrue du café africain au-delà de son rôle traditionnel d'exportation de produits de base.

Un homme pose au milieu de plants de café.
Ismaël Ndjewe Ndomba, Secrétaire exécutif de l'ACRAM, l'Agence des café Robusta d'Afrique et de Madagascar
© ACRAM

Comment le Robusta africain peut-il être compétitif dans le segment du Robusta fin ?

La qualité est à la base de tout. Pour modifier les perceptions, nous devons améliorer chaque aspect de la chaîne de valeur, de la culture à la transformation, en passant par la torréfaction et la commercialisation.

C'est pourquoi l'ACRAM se concentre sur quatre dimensions essentielles :

  • Les bonnes pratiques agricoles (BPA) : il s'agit de former les agriculteurs aux techniques optimales de récolte et de post-récolte afin de réduire les défauts et d'améliorer les profils de torréfaction ;
  • La certification et la traçabilité : il s'agit ici d'encourager les certifications de durabilité et les systèmes de traçabilité numérique pour améliorer la transparence ;
  • Les innovations en matière de transformation : il faut appuyer les investissements dans les méthodes de transformation lavées, au miel et naturelles, afin de diversifier les profils d'arômes ; et
  • Le positionnement sur le marché : le Robusta fin d'Afrique doit faire l'objet d'une campagne de promotion dans les salons professionnels internationaux et par le biais de partenariats directs avec les acheteurs de café de spécialité.
Une jeune Africaine avec tablier se concentre sur la mouture de café qu'elle s'apprête à placer dans le percolateur de la machine à café, tandis qu'un homme également en tablier en arrière fond l'observe, une fiche d'évaluation dans les mains.
Une concurrente au championnat de barista lors d'un événement de l'association africaine des cafés fins (African Fine Coffees Association, AFCA) en Tanzanie en février 2025.
© African Fine Coffees Association

Au-delà des exportations, comment faites-vous pour augmenter la consommation de café en Afrique ?

C'est une priorité absolue pour l'ACRAM. Malgré le fait que l'Afrique produise des millions de sacs de café par an, la consommation au sein du continent reste faible. Le renforcement de la culture locale du café est essentiel pour la durabilité économique. À cette fin, nous travaillons sur trois stratégies principales :

La première consiste à encourager la torréfaction et l'image de marque locales. Le café torréfié en Afrique conserve plus de valeur et fournit plus d'emplois que l'exportation de grains verts. Nous aidons les micro, petites et moyennes entreprises (MPME) à développer des marques de consommation adaptées aux goûts africains.

Ensuite, nous devons travailler au développement d'une culture moderne du café. À cet effet, nous encourageons les kiosques à café de spécialité, la formation des baristas et l'organisation de festivals du café comme le FestiCafé au Cameroun, afin de créer une demande et une appréciation pour le café produit localement.

Enfin, le commerce intra-africain est un autre domaine essentiel sur lequel nous nous concentrons avec nos partenaires. Grâce à des initiatives telles que le récent accord commercial sur le café conclu entre le Gabon, le Ghana et la République démocratique du Congo, nous créons un commerce direct entre les nations africaines, réduisant ainsi la dépendance à l'égard des marchés mondiaux volatils.

Nous pensons que le café africain doit d'abord être apprécié par les Africains. En stimulant la demande locale, nous pouvons créer un marché stable qui protège les agriculteurs des fluctuations des prix internationaux et renforce les chaînes de valeur régionales.

Un homme portant un masque hygiénique règle une machine à torréfier le café d'une main, une fiche technique dans l'autre.
Torréfaction du café chez Asili à l'aide d'une machine Giesen ultramoderne.
© Nana Kofi Acquah pour l'ITC

Quels sont les plus grands défis à relever pour développer ces initiatives ?

Les principaux défis sont le financement, l'infrastructure et l'accès au marché. De nombreux petits exploitants agricoles et de petites entreprises ont du mal à accéder aux capitaux nécessaires à l'achat d'équipements de transformation, à la certification et à l'image de marque. En outre, des infrastructures inadéquates – comme le stockage et le transport – limitent la compétitivité.

Pour y remédier, l'ACRAM facilite le financement des entreprises de café par le biais de partenariats bancaires régionaux et de forums d'investissement. Nous appuyons également l'adoption de technologies, notamment les systèmes de paiement numérique pour les caféiculteurs et les outils d'évaluation de la qualité basés sur l'IA.

Enfin, nous travaillons à renforcer le plaidoyer en faveur de politiques qui incitent à la transformation du café et réduisent les barrières commerciales entre les pays africains.

 

Un homme en chemise blanche et tablier verse des grains de café dans une machine à moudre.
Barista se préparant à moudre des grains de café lors du salon de l'African Fine Coffee Association (AFCA) en 2025.
© African Fine Coffee Association
Une femme présente une sélection de cafés Robusta sur un stand d'exposition.
Sélection de Robusta africain sur un stand d'exposition de l'AFCA 2025
© ITC

Quel message adressez-vous aux acheteurs de café du monde entier à propos du Robusta africain ?

Nous les invitons à dépasser les stéréotypes et à découvrir la richesse du Robusta africain.

Le travail que nous effectuons avec l'ITC, les partenaires européens et les producteurs africains ouvre de nouvelles opportunités pour les acheteurs de s'approvisionner en Robusta fin de haute qualité, durable et cultivé de manière éthique.

Le moment est venu d'embrasser l'avenir du café – et l'Afrique est en train de montrer la voie.

Une femme et un homme, debout, dégustent consciencieusement une tasse de café sur un stand d'exposition.
Dégustation de café au salon de l'AFCA 2025
© African Fine Coffee Association

* L'ACRAM est soutenu par le programme ACP Business-Friendly, mis en œuvre par le Centre du commerce international (ITC) et financé par l'Union européenne et l'Organisation des États d'Afrique, des Caraïbes et du Pacifique.