Les réfugiés représentent une opportunité, pas une difficulté
Nous traversons une crise humanitaire majeure. Plus de 50 millions de personnes dans le monde vivent actuellement en tant que réfugiés, fuyant des conflits et le changement climatique. Le soutien de la communauté internationale est plus sollicité que jamais.
De nombreux pays voient l'afflux de réfugiés uniquement comme un problème. Cependant, chaque crise apporte son lot d'opportunités. Lorsqu'on accorde aux réfugiés le droit de participer activement à l'économie locale et qu'on leur donne accès à l'emploi, non seulement ils soulagent le pays hôte en subvenant à leurs propres besoins, mais ils profitent aussi à l'économie locale. Il s'agit d'un fait simple et trop souvent ignoré: les réfugiés peuvent être bénéfiques à l'économie.
Le droit international a consacré le droit des réfugiés et des demandeurs d'asile à un emploi stable et régulier. L'accès au travail permet aux réfugiés d'être moins dépendants de l'aide. Plus encore, accomplir un travail productif est essentiel pour sauvegarder la dignité et le sens du travail social. Cependant, le plus souvent ces droits leur sont refusés dans la loi ou dans la pratique.
Une aubaine en termes de capital humainPlutôt que de considérer les réfugiés comme un gouffre pour les ressources locales, nous devrions les voir comme un capital humain prometteur et autosuffisant. Près de la moitié des réfugiés dans le monde sont en âge de travailler (18-59). Leur permettre de travailler peut pallier le manque de main-d’oeuvre dans les marchés locaux. Les réfugiés apportent souvent une formation, des connaissances et capacités qui peuvent accroître les ressources dans l'économie locale. Albert Einstein est peut-être l'exemple le plus connu de personnes arrivées comme réfugiées aux EUA.
Je vous donne un exemple. Lorsque nous avons construit des écoles au camp de Gulan en Afghanistan, à Khost, afin d'offrir une éducation aux 5 000 enfants des réfugiés pakistanais, nous avons trouvé rapidement des enseignants qualifiés. Nous avons engagé près de 100 enseignants qualifiés parmi les réfugiés, lesquels ont apprécié l'opportunité de travailler. Ils utilisent maintenant leur revenu pour soutenir leurs familles. Ils achètent des biens et services auprès de l'économie locale. Plusieurs de ces enseignants sont des femmes qui travaillent désormais dans les écoles de la communauté locale, palliant le manque d'enseignantes.
D'un autre côté, refuser le droit de travailler aux réfugiés peut avoir un effet très néfaste. Le manque de travail relègue des individus qualifiés à l'ennui et à la frustration. Cela est particulièrement le cas des femmes. Un rapport récent du Conseil norvégien pour les réfugiés (CNR) fait état d'un niveau élevé de dépression et de stress chez les femmes dans les camps de réfugiés à Kaboul, en raison de l'oisiveté et du confinement. Les hommes, tout aussi frustrés par le manque de travail, montraient des mécanismes négatifs d'adaptation tels que la violence et l'usage de drogues.
La marginalisation des réfugiés peut mener à l'insécurité et à l'instabilité dans le pays d'accueil. Selon les recherches, les réfugiés peuvent mettre en péril leur sécurité pour joindre les deux bouts en travaillant illégalement ou pour des salaires de misère dans des conditions inacceptables, par manque d'options. Les femmes sont les plus exposées à l'exploitation sexuelle, au harcèlement et au viol.
Malgré cela, l'accès au travail pour les réfugiés reste controversé pour certains. Plusieurs gouvernements craignent que les réfugiés s'installent définitivement si on leur offre l'accès à l'emploi et la mobilité économique. Ils peuvent également subir une pression politique due à la concurrence sur le marché de l'emploi, surtout lorsque le taux de chômage est élevé.
Moyens financiers pour rentrer chez soiCes préoccupations pourraient être sans fondement. En effet, les réfugiés sont plus susceptibles de démarrer de nouvelles entreprises que les locaux, créant des emplois et augmentant les recettes fiscales. Les réfugiés qui travaillent dopent la demande locale en achetant des biens et services locaux. Ils sont aussi plus susceptibles de rentrer au pays plus tôt, ayant les moyens financiers de le faire, et de mieux s'en sortir une fois chez eux.
Un réfugié passe en moyenne 20 ans en exil. Bien que l'aide restera toujours une réponse nécessaire en cas de crise de réfugiés, ce n'est pas une solution à long terme. Permettre aux réfugiés d'être autonomes n'est pas seulement une question de respect des droits de l'homme, mais il s'agit d'une politique qui peut profiter à tous.