Two man standing in front of Lion Foods sign
Lion Food garri satchels in box
Woman employee of Lion Food mixing garri in machine
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Établissez des relations et vous réussirez, comme Lion Food en Sierra Leone

8 avril 2025
Evelyn Seltier, Centre du commerce international

La vie de Victor Chukuma Johnson Jr n'a vraiment pas été un long fleuve tranquille, mais lorsque la guerre civile qui a ravagé la Sierra Leone pendant onze ans a enfin pris fin en 2002, cet entrepreneur autodidacte a vu des opportunités économiques là où beaucoup voyaient des difficultés. Sa vision d'une entreprise sociale durable exportant des produits alimentaires locaux, transformés et emballés, s'est concrétisée en Lion Food, Snacks and Beverages.

 

Aujourd'hui, les ambitions de ce propriétaire de petite entreprise vont au-delà du simple désir d'entrepreneuriat : il est déterminé à faire de Lion Food une marque nationale.

Victor Johnson, souriant, pose avec dans les mains les produits de Lion Food.
Victor Chukuma Johnson Jr, propriétaire et Directeur de Lion Food, Snacks and Beverages, dans ses installations de production à Waterloo, en Sierra Leone.
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

Originaire de Waterloo, capitale du district rural de la zone occidentale de la Sierra Leone, près de Freetown, Victor a grandi dans une région profondément marquée par la guerre. Waterloo est devenue une zone densément peuplée, abritant une importante communauté de jeunes, anciens combattants, avec un camp d'entraînement militaire situé à moins d'un kilomètre de sa future usine.

Compte tenu de l'environnement instable de l'après-guerre, il n'est pas surprenant que Victor ait d'abord poursuivi une carrière dans les télécommunications. Il a travaillé sur des systèmes de communication pour le Commonwealth britannique, la mission de maintien de la paix des Nations Unies, le Ministère de l'intérieur et l'Autorité nationale d'état civil, ainsi que pour quelques entreprises privées et diverses ONG.

Cependant, malgré son expertise en radiofréquences et systèmes informatiques – fruit de ses études suivies au Ghana, au Nigéria, au Niger, en Israël et au Royaume-Uni – Victor a finalement choisi une tout autre voie. Sa passion pour l'agriculture l'a amené à s'interroger sur la dépendance considérable de la Sierra Leone à l'égard des denrées alimentaires importées.

« Je me suis dit : toute notre nourriture est importée. Pourquoi ? Nous cultivons notre propre nourriture, nous devrions donc pouvoir acheter notre propre nourriture. »

Les usines sont le symbole de la capacité à se relever de la guerre.
Do not show
Des agriculteurs arrachent des pieds de manioc dans un champs.
Déraciner le manioc : en privilégiant l'approvisionnement local et la qualité, le fondateur de Lion Food réduit non seulement la dépendance du pays à l'égard des importations, mais ouvre également la voie à une industrie alimentaire plus forte et autosuffisante.
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

Lion Food – né de l'impératif de réduire le besoin de marques importées

Déterminé à ajouter de la valeur aux produits agricoles sierra-léonais, Victor s'est lancé dans la production de produits alimentaires transformés et conditionnés localement, capables de concurrencer les marques importées.

« Il faut faire des recherches approfondies. Par exemple, comment se vend la noix de cajou ? Les emballage doivent être tous identiques. C'est pourquoi j'ai d'abord investi dans l'image de marque de toute ma gamme de produits. C'est après que les gens sont prêts à essayer. À présent, je peux rivaliser avec tous ceux qui viennent de l'extérieur de la Sierra Leone ».

La réussite ne se résume toutefois pas uniquement à l'image de marque. Victor a compris qu'une croissance durable dépendait aussi de l'investissement dans les personnes. Par l'intermédiaire de Lion Agric Product, il a passé onze ans à travailler avec des agriculteurs, à renforcer les chaînes d'approvisionnement et à affiner ses produits avant de lancer officiellement Lion Food, Snacks and Beverages en 2019. En donnant la priorité à l'approvisionnement local et à la qualité, le fondateur de Lion Food réduit non seulement la dépendance du pays à l'égard des importations, mais ouvre également la voie à une industrie alimentaire plus forte et autosuffisante.

Une femme en tablier de cuisine épluche du manioc.
L'épluchage du manioc à la main, la base du « garri ».
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture
Nous ajoutons de la valeur à ce que nous cultivons.
Do not show
Des employées en tablier de cuisine lavent le manioc dans un grand bac.
Lavage du manioc avant le processus de broyage.
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

« Nous avons bâti notre entreprise en partant du principe que notre succès se mesure au nombre de personnes qui en bénéficient. Nous accordons une grande importance à nos clients, à nos fournisseurs et à nos employés. Pour appuyer les agriculteurs locaux, nous nous sommes associés à Ecobank Microfinance Sierra Leone pour le financement. Auparavant, près de 50 % des produits de nos agriculteurs étaient perdus en raison de la détérioration post-récolte, nous empêchant de répondre à la demande de traitement de l'ensemble des récoltes dans les délais impartis. Ce partenariat nous a permis non seulement de remédier à ces pertes, mais aussi de construire notre usine de conditionnement et de transformation à Waterloo. En outre, Apex Bank Sierra Leone a fourni des fonds à nos agriculteurs. »

L'emplacement de l'usine revêt une importance historique. À la fin de la guerre, les rebelles du Revolutionary United Front y ont brûlé leurs armes et leurs munitions, ce qui a mis le feu à toutes les maisons de la région.

« Après la guerre, j'ai choisi de transformer un lieu autrefois marqué par la destruction en un symbole de résilience, d'espoir et de progrès. Il témoigne de notre capacité à surmonter l'adversité et à construire un avenir meilleur pour la Sierra Leone. »

Les employés de Lion Food brassent le garri autour de la station de séchage.
Lion Food est la première entreprise de Sierra Leone à utiliser le biogaz et le gaz liquéfié pour la transformation des aliments (ici pour le séchage du garri).
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

Étape suivante : mettre en relation les acheteurs et les fournisseurs en Afrique de l'Ouest

En 2022, Lion Food a franchi une étape cruciale dans l'expansion de ses activités en développant des chaînes d'approvisionnement et de valeur en Afrique de l'Ouest. Grâce aux partenariats établis, l'entreprise a pu activement rechercher des opportunités pour renforcer sa présence sur le marché.

Dans le cadre de ce plan, Lion Food a rejoint le Centre du commerce international (ITC) pour suivre des formations sur la valeur ajoutée, l'image de marque et le marketing des produits, l'emballage et les exigences d'entrée sur le marché, et a assisté à des foires commerciales.  C'est ainsi que Victor a pu participer à West Africa Connect, une foire commerciale régionale et un événement interentreprises qui ont changé la donne pour sa petite entreprise.

Lors d'une foire commerciale, un stand de Lion Food présente les produits alimentaires de l'entreprise.
Stand d'exposition de Lion Food à la foire West Africa Connect

« Grâce à cette foire, je collabore dans la chaîne de valeur du manioc avec Meannan Foods, Oxy Industries Ltd, Edmass Foods Ltd et Christaa Agric Ventures au Ghana, ainsi qu'avec Dasun Integrated Farms Limited, Goalpath Nigeria Limited et Kitovu Technology Company au Nigéria. En outre, je travaille avec Give Smile Solutions au Togo et j'encourage les petites entreprises du Burkina Faso et du Bénin à conclure des contrats internationaux. Grâce à West Africa Connect, j'ai également pu entrer en contact avec la Chambre de commerce et d'industrie de Lagos. Les possibilités semblent infinies. »

Lion Food a su tisser des collaborations avec des entrepreneurs partageant les mêmes idées dans des domaines tels que l'emballage et les machines locales. L'entreprise tire également parti des accords commerciaux régionaux, notamment le Schéma de libéralisation du commerce de la CEDEAO (SLEC) et la Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), qui permettent à la Sierra Leone de commercialiser des produits en franchise de droits.

Au-delà de l'expansion commerciale, Lion Food a reçu une formation supplémentaire sur l'accès au financement et l'amélioration de la valeur des produits grâce à des techniques traditionnelles. L'entreprise lance actuellement une nouvelle ligne d'emballage avec des descriptions bilingues en anglais et en français, ce qui lui permet d'élargir son marché.

Au cours des deux dernières années, Victor a noué des liens précieux qui aident son entreprise à se développer rapidement, tout en maintenant la production et l'approvisionnement en Afrique. Par exemple, il utilise des installations de laboratoire, des services d'élaboration graphique et des prestataires de services logistiques au Nigéria et au Ghana, importe des graines de soja du Togo, échange des recettes de noix de cajou avec la Gambie, et facilite les transactions par le biais de mécanismes bancaires régionaux dans les monnaies locales.

« L'ITC a changé la dynamique pour nous. C'est pourquoi nous allons de l'avant dans notre engagement en faveur du commerce intra-africain. »

Vidéo

26 mars 2025
Gros plan sur les mains d'un employé de Lion Food utilisant une machine d'emballage pour remplir un sachet de garri.
L'entreprise a lancé une nouvelle ligne d'emballage avec des descriptions bilingues en anglais et en français, ce qui lui a permis d'élargir son marché.
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

Faire de Lion Food une lueur d'espoir pour les communautés et la planète

Lion Food est plus qu'une simple entreprise : c'est une entreprise sociale qui s'engage à créer un impact durable grâce à une approche de triple résultat qui équilibre les réussites à la fois sociale, environnementale et financière. « Notre objectif est d'harmoniser ces trois éléments afin de garantir un impact positif et durable pour toutes les personnes concernées. »

Victor ne crée pas seulement un impact social en embauchant une main-d'œuvre agricole essentiellement féminine, mais son entreprise est aussi la première en Sierra Leone à utiliser du biogaz et du gaz liquéfié pour la transformation des aliments. Les déchets des noyaux de palme servent de base aux biocarburants, aux engrais et au biogaz. Enfin, il y a quelques mois, l'entreprise a commencé à utiliser des panneaux solaires pour alimenter ses productions et réduire encore davantage son impact sur l'environnement.

« Je suis en train de construire une marque nationale avec des normes environnementales strictes, en vendant de la bonne nourriture à un bon prix. »

Au cours des cinq prochaines années, Lion Food souhaite se développer au-delà de la Sierra Leone et de l'Afrique. Pour permettre cette croissance, Victor prévoit d'attirer des investissements en achetant et en vendant des actions, ce qui permettra à l'entreprise d'accroître son impact.

« Notre vision est simple : lorsque les gens pensent à des aliments sains et abordables, ils pensent à nous. »

Je ne fais jamais de compromis sur la qualité. C'est la raison de notre succès.
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Victor Johnson pose dans un champs de manioc.
« Je suis en train de construire une marque nationale avec des normes environnementales strictes, en vendant de la bonne nourriture à un bon prix. »
© Ibrahim Miles Kamara / ITC / Fairpicture

Victor a participé aux activités du Programme de compétitivité de l'Afrique de l'Ouest (WACOMP), financé par l'Union européenne et mis en œuvre par le Centre du commerce international (ITC).

Le WACOMP est financé par l'Union européenne dans le cadre du 11e Fonds européen de développement. Le programme vise à renforcer la compétitivité des pays d'Afrique de l'Ouest et à améliorer leur intégration dans le système commercial à la fois régional et international. L'objectif global du programme est ainsi de « renforcer la compétitivité de l'Afrique de l'Ouest en améliorant les capacités de production, de transformation et d'exportation du secteur privé, conformément aux stratégies industrielles régionales et nationales et aux stratégies des PME ».