
Coton, textiles et habillement en Afrique : Transformer le secteur pour stimuler l'industrialisation
Étude de cas sur le coton, les textiles et l'habillement dans le cadre de la contribution des chaînes de valeur régionales au développement industriel de l'Afrique.
La Zone de libre-échange continentale africaine (ZLECAf), projet phare de l'Agenda 2063 de l'Union africaine (UA), est conçue pour promouvoir les chaînes de valeur régionales et favoriser une industrialisation transformatrice.
En 2023, le Conseil des ministres africains du commerce a demandé au Conseil consultatif sur le commerce et le développement industriel de la ZLECAf de procéder à un examen approfondi du secteur du coton, des textiles et de l'habillement en Afrique, afin d'en identifier ses contraintes et les politiques qui permettront de créer un secteur dynamique et compétitif.
L'objectif est d'élaborer un plan stratégique quinquennal pouvant être mis en œuvre dans le cadre de l'accord de la ZLECAf, notamment par la promotion des chaînes de valeur régionales.
Une partie du rôle du Conseil consultatif est de fournir des conseils stratégiques sur diverses questions, y compris dans les domaines où les négociations sont dans l'impasse, comme c'est le cas pour les règles d'origine concernant les produits textiles et d'habillement.

La ZLECAf accorde la priorité aux chaînes de valeur régionales du coton, des textiles et de l'habillement comme l'un des moteurs du programme d'industrialisation de l'Afrique, car ce secteur contribue de manière substantielle au développement économique, à l'identité culturelle et à l'influence mondiale de l'Afrique.
L'UNESCO indique que si l'Afrique libère tout son potentiel, elle pourrait devenir le prochain leader mondial de la mode. Le continent est un important producteur de matières premières, dont le coton qui est produit dans 37 pays sur 54. Par ailleurs, l'Afrique exporte des produits textiles pour une valeur de 15,5 milliards de dollars par an et importe des textiles, des vêtements et des chaussures pour une valeur de 23,1 milliards de dollars par an.
Depuis le lancement des négociations sur la ZLECAf, les pays africains sont parvenus au bout de discussions sur plusieurs protocoles, ouvrant ainsi la voie au libre-échange dans toute l'Afrique. Un des défis majeurs de ces négociations fut de parvenir à un accord sur les règles d'origine pour le secteur du coton, des textiles et de l'habillement.
Les règles d'origine servent généralement de mécanisme commercial pour garantir que la valeur ajoutée a lieu au sein de la zone de libre-échange et pour empêcher le transbordement de produits de base d'un pays tiers dans une zone commerciale préférentielle.

Le Conseil consultatif a mené une consultation à l'échelle du continent avec des acteurs du secteur privé représentant les différents segments des chaînes de valeur du coton, des textiles et de l'habillement, ainsi que différents pays et sous-régions d'Afrique. L'accent a été mis sur les avis et les perspectives du secteur privé, ainsi que sur ses aspirations et sa vision du secteur.
En étroite collaboration avec le Secrétariat de la ZLECAf et l'École publique de gouvernance Nelson Mandela, le Conseil a créé trois groupes de travail menés par des représentants du secteur privé, qui sont parvenu à la conclusion qu'une stratégie quinquennale devait être élaborée, axée sur la création de chaînes de valeur régionales compétitives, de la fibre à l'habillement.
Cette proposition a été approuvée par le Conseil des ministres africains du commerce en janvier 2023.
Par la suite, les groupes de travail, en étroite consultation avec le Secrétariat de la ZLECAf, ont organisé plusieurs ateliers consultatifs multipartites selon trois domaines thématiques, avec l'objectif de trouver les réponses aux défis auxquels le secteur privé est confronté.
Le premier groupe de travail était chargé de formuler une vision de la chaîne de valeur régionale pour les textiles et l'habillement, alignée sur les objectifs de développement de la valeur aux niveaux national et international, et d'attirer les investissements étrangers directs.
Le deuxième groupe de travail devait évaluer les capacités de production et la compétitivité des exportations, en se concentrant sur l'investissement, la durabilité, la technologie et l'innovation, et identifier les moyens de les améliorer.
Le troisième groupe de travail s'est concentré sur les barrières non tarifaires et les questions liées aux règles d'origine.

Les groupes de travail ont confirmé le potentiel de développement des chaînes de valeur régionales, à condition de définir des retours sur objectifs (ROO) qui permettront de faire progresser l'industrialisation et le programme de développement économique de l'Afrique. Les groupes de travail ont également souligné l'importance d'élaborer des ROO attractifs pour les investissements dans des chaînes de valeur verticalement intégrées, tout en insistant sur la facilité de leur mise en œuvre et de leur respect, avec la garantie d'équité pour toutes les parties concernées.
La stratégie renforcera la marge de manœuvre politique pour la mise en œuvre de mesures de localisation et la réglementation des importations de seconde main. Une attention particulière sera également accordée au rôle primordial des communautés économiques régionales (CER), notamment dans le contexte de la mise en œuvre de la ZLECAf, et à l'expansion des plateformes de production dans un plus grand nombre de pays.
La stratégie devra également permettre de s'attaquer aux défis environnementaux découlant d'une mauvaise gestion des déchets, de systèmes de traitement et de recyclage inadéquats, d'investissements insuffisants dans l'infrastructure logistique, la technologie et les mesures de productivité, ainsi que d'un manque d'expertise et de compétences techniques.
En outre, la stratégie comprendra des normes et des pratiques visant à atténuer la fausse compétitivité tout en s'attaquant aux problèmes de logistique et de pénurie de devises. Elle abordera également le rôle significatif des parcs industriels en tant que solutions aux défis liés à l'infrastructure industrielle auxquels sont confrontés les investisseurs potentiels.
Enfin, la stratégie abordera les réglementations commerciales nationales afin de préserver la santé publique, la sécurité et l'environnement, tout en tenant compte de l'accès aux marchés ainsi que des mécanismes de lutte contre les mesures non tarifaires au sein de la ZLECAf. Elle devra s'assurer que les capacités limitées de gestion des douanes et la fraude ne compromettent pas le fonctionnement efficace des règles d'origine négociées.
L'établissement de chaînes de valeur régionales dans le secteur du coton, des textiles et de l'habillement sur l'ensemble du continent africain constituera une réalisation historique pour l'Afrique et la mise en œuvre de la ZLECAf. Ce succès pourra inspirer d'autres chaînes de valeur régionales potentielles, notamment dans les secteurs de l'agroalimentaire, des produits pharmaceutiques, des minéraux essentiels et des batteries électriques de l'industrie automobile.