
Analyse de l'impact potentiel des droits de douane américains sur les pays en développement
Les pays en développement sont confrontés à certaines des conséquences les plus graves de la dernière série de droits de douane imposés par les États-Unis d'Amérique, annoncée le 2 avril.
Pour commencer, voici un aperçu des niveaux de protection estimés (barres bleues) utilisés comme référence dans le calcul des droits de douane réciproques, partagés par le Bureau du représentant américain au commerce le 2 avril. Ce graphique montre également les droits de douane que les pays appliquent effectivement aux importations en provenance des États-Unis (losanges oranges).
Les niveaux de protection estimés par le Bureau du représentant américain au commerce sur son tableau de bord dépassent de 95 points de pourcentage les taux que les pays appliquent effectivement aux importations américaines en matière de droits de douane. Une réduction d'environ 50 % de ces niveaux de protection estimés a été annoncée en tant que nouveau « tarif réciproque ». Pour de nombreux pays, cela signifie que les futurs droits de douane américains seront bien supérieurs aux taux moyens que ces pays appliquent aux importations en provenance des États-Unis, sans tenir compte des autres barrières commerciales.
Certains des pays qui seront confrontés aux droits de douane réciproques les plus élevés lorsqu'ils exporteront leurs biens vers le marché américain sont parmi les moins avancés, notamment le Lesotho (50 %), le Cambodge (49 %), la République démocratique populaire lao (48 %), Madagascar (47 %) et le Myanmar (45 %).
Certains de ces pays dépendent fortement du marché américain pour leurs exportations. Par exemple, 35 % des exportations du Cambodge sont destinées aux États-Unis ; pour le Lesotho et Madagascar, le marché américain représente respectivement 27 % et 18 % des exportations.
Alors que le commerce mondial dans son ensemble pourrait connaître une baisse, certains pays et secteurs compétitifs à l'échelle mondiale peuvent se tourner vers de nouveaux marchés afin de mieux résister aux changements politiques et aux autres risques liés à la chaîne d'approvisionnement. Les données de l'outil de l'ITC Export Potential Map (Carte du potentiel d'exportation) montrent que Madagascar, célèbre pour sa vanille (qui représente la moitié de l'offre mondiale), pourrait accroître ses exportations vers des marchés plus petits tels que le Canada, ou se diversifier sur de nouveaux marchés, notamment l'Indonésie. Bien que cela ne compense pas les pertes anticipées, le fait de disposer d'une base plus diversifiée de marchés peut contribuer à réduire le risque de perturbations commerciales.
Si l'on prend l'exemple de la Suisse, siège du Centre du commerce international (ITC), le pays va devoir faire face à des droits de douane de 32 % – à l'exception des produits pharmaceutiques, premier secteur d'activité du pays. Ses exportations de montres seront fortement affectées, car les États-Unis sont le premier marché d'exportation de la Suisse pour ce produit. Selon les données de l'ITC, les horlogers suisses pourraient tirer parti d'un accord de libre-échange avec la Chine et répondre à la demande croissante de montres de ce pays.
Passons aux données et analyses de l'ITC sur l'automobile, couvrant les véhicules et les pièces détachées : la Slovaquie, le Japon et le Honduras font partie des pays potentiellement très exposés aux droits de douane américains. Par exposé, il faut comprendre que le marché américain représente une part importante des exportations du secteur automobile d'un pays, et que le secteur automobile lui-même représente une part significative de leurs exportations totales.
Pour le Japon, le secteur automobile représente 20 % des exportations totales du pays, dont la majorité est destinée au marché américain.
Selon les calculs de l'ITC, les droits de douane fixes de 25 % appliqués à ce secteur signifient que le Japon pourrait perdre 17 milliards de dollars en potentiel d'exportation vers les États-Unis. Les pays en développement, notamment la Thaïlande, l'Inde, le Brésil et le Viet Nam, devraient également voir leur potentiel d'exportation vers les États-Unis réduit. Il est important de noter qu'il ne s'agit là que de l'effet des droits de douane sur l'automobile. Les droits de douane sur l'acier et l'aluminium entrés en vigueur le mois dernier et les droits de douane réciproques annoncés le 2 avril frapperont encore plus durement certains pays en développement.
Au vu des nouveaux tarifs douaniers, certains pays comme le Japon peuvent essayer de diversifier leurs destinations d'exportation de véhicules. Des marchés tels que la Chine, l'Allemagne, les Philippines et la Thaïlande détiennent ensemble un potentiel d'exportation non réalisé pour les véhicules japonais qui correspond à la perte estimée sur le marché américain.
Pour produire les données et l'analyse présentées ici, l'équipe de la section Analyse du commerce et du marché de l'ITC a utilisé les outils en ligne de l'organisation, à savoir Trade Map (Carte du commerce), Export Potential Map (Carte du potentiel d'exportation), Market Access Map (Carte d'accès au marché), ainsi que les Trade Briefs (dossiers commerciaux), tous disponibles gratuitement.
Pour apprendre à utiliser ces outils, l'ITC organise un webinaire d'une heure les 7 et 8 avril :
Lundi 7 avril à 15h00 CET, GMT+2 : https://intracen.zoom.us/meeting/register/h7E7tREWRV-kZCKd_S0HnA
Mardi 8 avril à 09h00 CET, GMT+2 : https://intracen.zoom.us/meeting/register/zGL6guSUQHCz0kjQ7UMOfw