Les obstacles à l'exportation sont parfois sans rapport direct
avec le commerce. La pauvreté, le VIH/SIDA, le handicap,
l'isolement culturel sont autant de problèmes freinant l'activité
des entreprises. Les organisations non gouvernementales (ONG)
actives dans ces secteurs peuvent appuyer les organisations
«traditionnelles» de développement du commerce chargées d'améliorer
la capacité d'exportation.
Parfois, elles initient le développement des exportations.
Ainsi, devant l'impact de l'agriculture intensive, des ONG se
lancent dans la promotion des produits biologiques.
Les ONG ne sont certes pas les premiers partenaires qui
s'imposent quand on élabore des projets de développement du
commerce; il nous semble pourtant que là comme dans d'autres
secteurs du développement, leur influence s'intensifie. La
documentation sur le sujet étant limitée, nous avons dû mener notre
propre enquête, à commencer par le personnel du CCI.
Choisir les bons collaborateurs
Par Fabrice Leclercq, Administrateur principal en promotion
commerciale, CCI
Depuis son lancement en juillet 2002, le Programme du CCI de
réduction de la pauvreté par l'exportation collabore efficacement
avec les ONG. Leur engagement auprès des plus démunis nous a
rapprochés sans qu'elles soient notre partenaire privilégié. Ainsi,
nous travaillons avec State Development Corporation en Afrique du
Sud, une entreprise privée du Brésil et une coopérative de
producteurs au El Salvador. Nous avons également créé une fondation
en Bolivie.
Trouver le bon partenaire
Le choix du partenaire est un facteur clé de réussite tout comme
la façon dont nos partenaires collaborent et échangent des
informations dans le cadre d'un réseau interactif, par le biais
d'ateliers réguliers notamment. Qu'il s'agisse d'institutions
d'appui au commerce ou d'ONG, les questions que nous nous posons
sont les mêmes:
- Appropriation: Les communautés
pauvres ont-elles leur mot à dire sur la planification et la mise
en œuvre au sein de l'organisation?
- Rôle directeur: L'organisation
cible-t-elle les communautés pauvres et est-elle prête à coopérer
et communiquer avec d'autres parties prenantes?
- Durabilité financière: L'organisation
est-elle capable de générer des revenus durables? Ses procédures
comptables sont-elles fiables et transparentes?
- Capacité: L'organisation a-t-elle la
capacité de mettre en œuvre, contrôler et évaluer les
activités?
- Services: Quels services (incluant le
plaidoyer) peut fournir l'organisation aux communautés pauvres, à
ses membres ou à ses clients?
Ces lignes directrices sont incluses dans notre dossier de
formation, qui régit les projets de réduction de la pauvreté par
l'exportation. Les autorités et les donateurs s'en inspirent
également pour intégrer les projets de réduction de la pauvreté
dans leurs programmes de développement.
Le dossier se compose de cinq volumes; une partie est consacrée
à l'identification, la sélection et la création de liens avec les
partenaires du programme, notamment les ONG.
Dans le cadre de notre travail - qui vise à intégrer les
communautés pauvres aux chaînes de production et d'exportation
existantes - nous cherchons à créer des partenariats avec les
membres d'ONG engagés dans le commerce équitable car ils peuvent
être des partenaires efficaces pour stimuler les producteurs et
commercialiser les produits.
Contacter:leclercq@intracen.org
La Colombie mise sur le tourisme
communautaire
Par Matias Urrutigoity, Administrateur en promotion commerciale,
CCI
Pour nous, il était important que l'ONG associée à notre projet
de tourisme communautaire ait été formée par des autochtones pour
développer l'économie locale et qu'elle bénéficie du soutien de
Proexport, organisation nationale de promotion du commerce de
Colombie. C'était l'assurance d'une appropriation locale et d'un
appui institutionnel efficace à l'effort de développement.
Le projet s'est focalisé sur San Andres et Providencia, deux
îles situées dans les Caraïbes au large des côtes du Nicaragua,
appartenant autrefois à l'empire britannique; les habitants, qui
descendent d'esclaves africains, parlent anglais et créole,
contrairement au reste de la Colombie. Par leur mode de vie, axé
sur la pêche, ils se rapprochent plus des Caraïbes que de
l'Amérique latine.
La situation et l'atmosphère de San Andres en font une
destination très prisée des hommes d'affaires du continent
colombien et d'autres régions d'Amérique latine. Mais les
disparités culturelles n'ont pas permis d'intégrer la population
locale au développement touristique. Ce sont des multinationales
basées à l'étranger qui ont construit l'infrastructure hôtelière.
La majorité des touristes voyage en formule «tout compris» et
dépense peu sur l'île. L'offre locale pêchant par manque de
fiabilité ou de qualité, de nombreux produits et services requis
par l'industrie touristique doivent être importés.
Initiative locale
Reconnaissant le problème, les membres de la localité ont créé
une fondation (Fundesap) il y a dix ans pour encourager le
développement social durable. Proexport a demandé l'aide du CCI et
de Fundesap pour associer la population locale aux services
touristiques. Nous avons mené une évaluation des besoins dans la
région fin 2005.
Le projet encouragera les services touristiques locaux: location
de maisons et de chambres en bord de plage, location hôtelière et
promenades à cheval, restaurants et autres. En recrutant leur
personnel parmi la population anglophone locale, les hôtels
pourraient séduire les touristes anglophones.
Contacter:urrutigoity@intracen.org
Les ONG misent sur le bio
Par Alexander Kasterine, Conseiller principal en développement
de marchés, CCI
Les ONG ont été les pionnières du mouvement bio, qui pèse
actuellement US$ 30 milliards. En 1946, un groupe d'agriculteurs,
de scientifiques et de nutritionnistes du Royaume-Uni, emmené par
Lady Eve Balfour, a créé Soil Association, première organisation de
promotion de l'agriculture bio.
Actuellement, les ONG de tous niveaux sont le fer de lance de
l'agriculture bio, depuis la Fédération internationale des
mouvements de l'agriculture biologique (IFOAM) qui fixe les normes
et promeut le secteur à l'échelon international jusqu'aux
organisations locales d'agriculteurs.
 © CCI/ A.
Kasterine | Dans le cadre d'un projet du CCI, Chido
Makunike, de l'Africa Organic Service Centre de l'IFOAM, anime un
débat sur la commercialisation en ligne des produits bio et
naturels à Accra au Ghana.
|
Les ONG jouent un rôle multiforme dans l'agriculture des pays en
développement. Elles organisent les agriculteurs, offrent des
informations sur les marchés, dispensent une formation et
s'improvisent avocats, voire marchands, sur les marchés mondiaux.
L'agriculture bio peut faciliter l'accès des petits agriculteurs à
ces marchés tout en améliorant la santé et l'environnement des
communautés.
Connaissances spécialisées
Le bio exige de grandes connaissances. Les agriculteurs doivent
se réapproprier les techniques de production durables, trouver des
informations sur les marchés et assimiler les normes et la
certification, autant de difficultés pour des agriculteurs
analphabètes et ceux des régions reculées. Les ONG peuvent combler
ce déficit de connaissances grâce à leurs liens étroits avec les
groupements d'agriculteurs et à leur capacité en matière de
sensibilisation et de formation.
Dans le secteur bio, les ONG nous aident à élaborer et appliquer
plus efficacement les projets. En Thaïlande, le CCI et Earthnet
Foundation, une ONG nationale de défense du bio, forment
fonctionnaires et entreprises aux normes de production et
d'exportation. Au Ghana, le CCI et les organisations locales
dispensent aux entreprises bio une formation à l'internet pour les
aider à trouver des informations sur les marchés et à
commercialiser leurs produits.
Contacter:kasterine@intracen.org
Notre nouveau site sur le bio:http://www.intracen.org/organics
Au Mozambique, la santé au service du
commerce
Par Monica Yesudian, Assistante en développement de projet et
commercialisation, CCI
Depuis 2004, le CCI aide les communautés pauvres des forêts
menacées de disparition de la province de Sofala au Mozambique à
développer et exporter de façon durable des bijoux en bois.
Le Gouvernement d'Irlande finance le projet. Une entreprise
privée, Sofala Investment Lda, dirigée par un entrepreneur social,
Allan Schwarz, joue un rôle clé; elle aide les communautés
forestières à fabriquer des bijoux de bois et lance des programmes
de reforestation à petite échelle.
Les débouchés ne manquent pas mais six des 18 personnes formées
dans le cadre du projet sont décédées du VIH/SIDA.
Par l'entremise de M. Schwarz, le CCI a contacté l'ONG
mozambicaine Formation internationale pour les orphelins et leur
survie (TIOS), qui offre désormais aux communautés une formation
sur le VIH/SIDA axée sur la prévention, le traitement et les soins
à domicile. L'ONG distribue aussi aux habitants des forêts des
contraceptifs et des compléments vitaminiques pour stimuler leur
système immunitaire.
Nous avons aussi lancé un projet de tourisme communautaire dans
la région de Maputo avec Kulima, ONG locale dynamique regroupant
agriculteurs, universitaires et entreprises de commercialisation,
en vue de renforcer les capacités technologiques et
institutionnelles des organisations locales et des cultivateurs, et
d'approvisionner les grands hôtels de la région. Actuellement, près
de 90% des denrées consommées dans l'hôtellerie-restauration sont
importées faute de produits locaux en quantité et qualité
suffisantes.
Kulima, axée au départ sur les soins médicaux primaires, s'est
engagée dans l'agriculture. Elle forme entre 300 et 400
agriculteurs aux techniques agricoles et de compostage efficaces
afin d'améliorer leur production et de se conformer aux normes
touristiques. Le CCI soutient le projet dans le cadre du plan
stratégique national du Gouvernement visant à développer le
tourisme au Mozambique entre 2004 et 2014.
Contacter: yesudian@intracen.org
Les professionnels handicapés exportent des
services
Par Pablo Lo Moro, Administrateur en promotion commerciale,
CCI
Durant 2005, le CCI a collaboré avec une ONG brésilienne
(Instituto Paradigma) à la recherche de nouveaux marchés
d'exportation pour les handicapés de la grande métropole
industrielle de São Paulo.
Fernando Botelho, ancien consultant du CCI, lui-même non-voyant,
a mené une recherche sur les ONG latino-américaines oeuvrant à
l'amélioration des opportunités d'emploi des handicapés et
découvert que de nombreuses ONG étaient très actives et créatives
dans ce secteur. Son rapport révèle que, si 70% à 80% des
handicapés sont victimes du chômage ou du sous-emploi, les préjugés
restent le principal obstacle à leur accès à l'emploi.
M. Botelho rapporte de nombreux cas d'handicapés travaillant
dans l'exportation de services, depuis les ingénieurs et les
traducteurs jusqu'aux cuisiniers des grands hôtels. Les entreprises
font de leurs aptitudes particulières un avantage économique.
Ainsi, une société chargée du contrôle qualité dans le secteur de
la parfumerie en Argentine estime que les non-voyants sont plus
productifs.
Suite à ce rapport, le CCI a fait avancer le projet. Dans le
cadre d'une initiative pilote, l'unité en charge du commerce des
services a formé un petit groupe de personnes à l'exportation de
services. Instituto Paradigma a délibérément choisi des diplômés de
l'enseignement supérieur mieux à même de tirer parti de l'occasion
offerte. Le CCI a choisi São Paulo pour l'importance et le
dynamisme de son économie mais aussi pour la législation
avant-gardiste du Brésil en matière de handicap.
Approche pratique
Le CCI s'est inspiré du Centre Ann Sullivan, une ONG basée au
Pérou travaillant avec les handicapés mentaux. Dans ce centre,
chaque handicapé bénéficie d'une formation intensive à long terme.
A São Paulo, Paradigma a recruté des formateurs pour le groupe
pilote composés majoritairement de volontaires de grands
prestataires de services.
Paradigma s'est inspirée de la méthodologie du CCI pour
développer les exportations de services en l'adaptant le cas
échéant. Le nouveau matériel pédagogique peut être utilisé dans les
futurs projets destinés aux professionnels handicapés.
Le CCI a financé ce projet novateur qui constitue un test pour
ses ressources limitées. Nous estimons que la méthodologie a un
fort potentiel de reproduction, au Brésil et ailleurs.
Contacter: lomoro@intracen.org